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"C'est un crime contre l'Humanité et contre les générations futures"

Interview de William Ramos, un jeune étudiant et militant contre les exploitations minières illégales en Amazonie. Il a participé à l'expulsion d'une exploitation minière à Puerto Unión, dans le district de Perené, Province de Chanchamayo (Pérou). Sensible aux questions environnementales, ce jeune est un espoir pour la prise de conscience des futures générations.

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William Ramos, jeune étudiant. Santa Ana, Perené, Amazonie (Pérou).

Que pouvez-vous nous dire sur la centrale Hydroélectrique à Santa Ana (Perené)?

La centrale hydroélectrique EGE Santa Ana est en train de causer des dégâts importants sur notre écosystème. Comme vous avez pu le remarquer, à cause de la sécheresse du fleuve Huatziroki, l'ensemble des poissons -les algues incluses- ont été fortement affectés. Il y a une altération du système et une négligence de nos autorités qui devraient agir en faveur du peuple. Mais moi, en tant que jeune, lorsque j'avais seulement 15 ans, j'écoutais des personnes défendre l'entreprise EGE Santa Ana en affirmant que celle-ci allait apporter du progrès. Oui, l'entreprise a permis de créer des emplois, mais le travail qu'elle a apporté est seulement temporel, une fois terminée la construction de la centrale hydroélectrique, la plupart du personnel est au chômage. Alors, non, elle ne permet aucun développement pour la population. C'est un profit réalisé par EGE Santa Ana à partir de la richesse hydrique de notre fleuve Huatziroki.  

Une fois l'énergie obtenue, que fait l'entreprise? 
Je ne sais pas si elle est distribuée dans cette zone ou si elle est envoyée dans des pays extérieurs. C'est ce que font les entreprises au Pérou, elles envoient l'énergie électrique de notre ressource hydrique à d'autres pays. C'est très grave. Nos dirigeants et nos gouvernements locaux ont dû gérer, par l'intermédiaire d'un accord, la réduction du tarif de l'électricité à Perené et dans toute la Selva Central, mais cela n'a pas été fait. On peut dire que c'est un pillage de nos ressources en eau. Il n'y a aucun bénéfice pour nous et aucun développement. 

 

Pouvez-vous nous expliquer la problématique de l'exploitation minière de Puerto Unión ? 
Actuellement, nous sommes à Puerto Unión. L'autre jour, dans la zone de Las Pampas (Madre de Dios), le Ministre de l'Energie et des Mines, a mis en marche une collaboration avec les autorités gouvernementales afin d'éradiquer l'exploitation minière illégale. Cependant, dans la Selva Central, à Perené, et plus précisemment à Puerto Union, cela n'est pas encore arrivé. Ici, le peuple et leurs leaders ont déjà épuisé toutes les solutions pacifiques par l'intermédiaire des agences gouvernementales responsables de l'environnement, telles que: ANA, Oefa et toutes les agences environnementales, y compris le bureau du procureur. Mais tout cela reste sans réponse. 

La dernière fois, la population, fatiguée de ne recevoir aucunes réponses concrètes, a opté pour une solution beaucoup plus forte et radicale : l'expulsion de l'exploitation illégale qui extrait du manganèse. Cette entreprise, "Metal Sad", est coréenne et son chef est un coréen. Cependant, après cette première expulsion, ils ont modifié le nom. Aujourd'hui, ils disent que l'entreprise appartient à un certain "Blanc", mais tout cela est une stratégie pour pouvoir frauder et fuire ses responsabilités. En réalité, celui qui est toujours à la tête de l'entreprise est bel et bien le coréen. 


C'est pratiquement une déforestation de la montagne, car ils creusent et commencent à préparer le terrain pour extraire le manganèse (élément chimique de numéro atomique 25). Par conséquent, l'environnement est touché de plein fouet, y compris le fleuve Perené. L'exploitation minière affecte grandement le fleuve car elle ne détient pas l'ensemble des paramètres environnementaux. De plus, elle entre par la force dans la zone de Puerto Unión, car elle a eu une consultation préalable. 


En effet, selon les organismes internationaux, l'accord de l'OIT (Organisme International du Travail) -169- confirme qu'il faut consulter au préalable les peuples indigènes et les paysans -article 55 de la Constitution Politique du Pérou ratifiant que tout droit international, toujours et quand il est ratifié par la partie législative, est un droit de tous les citoyens péruviens-. Oui, il y a eu une consultation au préalable dans la zone de Puerto Unión, et ils ont dit qu'ils allaient partir, mais malheureusement ils ne sont pas partis. A l'heure actuelle, ils continuent de travailler dans cette zone. 

C'est une très grande problématique car, au sein de l'Amazonie, toute la Selva Central (Amazonie Centrale) est une zone agricole et touristique. Il serait plus judicieux d'améliorer et de moderniser l'agriculture et le tourisme pour avoir des visiteurs étrangers, mais malheureusement personne ne travaille cette thématique. 

Quelles sont les conséquences sur le fleuve?

 
Quand ils effectuent le lavage de l'exploitation, tous les résidus qui ne servent pas sont jetés directement dans le fleuve. C'est un dégât écologique important pour nos poissons et nos algues aquatiques qui vivent dans notre fleuve Perené. L'exploitation contamine l'eau et également l'environnement, car chaque minerai possède ses propres réactions.

Quel est le rôle de l'Etat face à cela ?

 

Face aux problématiques des centrales hydroélectriques et des exploitations minières illégales qui envahissent la Selva Central, on assiste à un crime contre l'humanité et contre les futures générations. Les organismes environnementaux ne font pas leur devoir en ce qui concerne l'environnement. Leur rôle est de travailler en faveur de l'environnement et de veiller au futur des prochaines générations, mais ils ne font rien. Le bureau du procurreur lui-même protège l'exploitation minière illégale.

Le rôle des médias ? 


Le rôle des médias en ce qui concerne l'environnement est momentané, seulement lorsqu'il y a des expulsions. Par exemple, l'autre jour, quand l'expulsion a eu lieue, il y avait quelques médias. Cependant, ils ne travaillent pas pour l'environnement, comme ils devraient le faire, en réalisant des discours à la radio, par exemple, pour sensibiliser les enfants et les jeunes à ne pas jeter de déchets dans les rivières ou dans les rues. Il nous manque une éducation environnementale, c'est une thématique qui n'est traitée ni dans les collèges, ni dans les universités au Pérou. 

Comment imaginez-vous le futur de la Selva Central? 


Tout devrait s'analyser avec une vision futuriste, mais ça ne se passe pas ainsi. Cette zone, nettement agricole et touristique, fournit des fruits comme l'avocat ou l'orange mais aussi du café au marché National. Cependant, si l'accès aux exploitations minières, aux centrales hydroélectriques ou aux entreprises d'hydrocarbures continue d'être autorisé -au sein du district de Perené, dans toute la Selva Central ou encore en Amazonie en général- nous aurons beaucoup de problèmes sociaux et économiques dans un futur proche.


En effet, notre écosystème va se détruire. Notre zone vit du tourisme, et si son moyen de survivre disparait, comment pouvons-nous imaginer le futur des prochaines générations ? Il faut y penser. Selon moi, l'exploitation minière est en lien avec la Révolution Industrielle que l'on peut apercevoir au niveau mondial. Voilà pourquoi je pense qu'il faut arrêter la Révolution Industrielle et commencer la Révolution Environnementale au niveau mondial et à l'échelle de l'Humanité. Une Révolution Ecologique. Il est temps d'agir car, dans peu de temps, nous allons souffrir les conséquences. Nos gouvernements locaux et régionaux doivent travailler sur le sujet au niveau de la Selva Central et de l'Amazonie en Général.  

Les jeunes sont-ils conscients de cette problématique? 


Le rôle de l'Etat est d'éduquer les jeunes pour la protection de l'environnement mais ce n'est pas encore en marche, car notre système de base favorise les sociétés d'exploitation minière illégale en affirmant qu’elles apporteront un développement à la région. Les enfants et les jeunes ne sont donc pas éduqués à protéger leur environnement et beaucoup ne sont pas conscients. Il y a même des jeunes de mon âge qui sont tombés dans l'alcool et la drogue, l'Etat ne remplit pas son rôle en les éduquant socialement, culturellement et écologiquement. Les jeunes se convertissent en des êtres individualistes et non-protecteurs de l'environnement. 
De plus, comme on le sait parfaitement, certaines exploitations minières illégales font ce qu'elles souhaitent sur leurs propriétés privées. Cependant, l'environnement appartient à ceux qui savent le protéger. La Selva Central fait partie de zone forestière protégée de Pui Pui, alors elle doit être protégée de manière écologique et agricole. 

Dans 50 ans va-t-il y avoir du changement?


Bien sûr, il va y avoir un changement extrêmement négatif dans les 50 ans à venir car aucun travail n'est réalisé autour de l'environnement. Les enfants et les jeunes ne sont pas sensibilisés, nos autorités locales, provinciales et régionales ne travaillent pas. Il faut une éducation pour jeter, par exemple, les déchets où il faut. En voyant qu'il y a du personnel pour nettoyer, ils pensent qu'ils peuvent jeter leurs déchets dans la rue, mais cela ne doit pas être ainsi. Je pense que l'éducation vient également de la maison. 

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Exploitation Minière illégale de Puerto Unión, Perené, Pérou.

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